Les tables rondes de l'édition 2018 : Adaptation des entreprises au changement climatique

Compte rendu de la table ronde


Invités :
EDF DTG (Division Technique Générale) : Margaux ROUBAUD du Centre d’Hydro-Météo Pyrénées Massif Central (CHPMC)
EDF R&D (Recherche et Développement) : Laurent DUBUS du Centre OSIRIS (Optimisation, SImulation, RIsques et Statistiques).
Météorage : Stéphane SCHMITT.
SUNiBrain : Damien DUMEZ.
Equipe :
Animateur : David POLLACK, enseignant à l'ENM
Co-animateur : Simon MITTELBERGER, étudiant en 3ème année à l’ENM, semestre Services météo-climatiques
Scribes : Alice LEMANT, Jeoffrey KOEGLER, étudiants en 3ème année à l’ENM, semestre Services météo-climatiques

Présentation des entreprises :

EDF DTG (Division Technique Générale) :
Les prévisions météorologiques ont un rôle primordial pour cette entreprise. Par exemple, dans le cadre de l’énergie hydraulique, EDF est amené à anticiper les apports en eau (fonte des neiges, précipitation) dans les barrages afin de prévoir leur production d’électricité. Pour autant, la prévision météorologique est aussi importante sur le plan de la sécurité. En effet, des crues, des vents violents et autres phénomènes météorologiques peuvent endommager le réseau électrique.

EDF R&D (Recherche et Développement) :
Le domaine de l’énergie doit répondre à 3 problématiques : la soutenabilité de la production (capacité de la production à répondre aux fluctuations de la demande), le transport de l’énergie et le maintient d’un prix abordable pour la population. EDF tendant à augmenter les énergies bas-carbone du type énergies renouvelables, les deux premières problématiques sont fortement liées à la météorologie. À OSIRIS, on étudie l’impact de la première problématique et du climat sur les activités d’EDF.

Météorage :
Météorage est une filiale de Météo-France qui observe et prévois à courte échéance les impacts de foudre. Le changement climatique tend à augmenter le nombre de foudroiements. L’année 2018 a été une année record avec un nombre total de foudroiement équivalent à celui de 2016 et 2017 cumulés. Ces foudroiements ont un impact tant économique (destruction de biens) que social (meurtrier de façon directe ou indirecte). La foudre tue principalement dans les régions les plus pauvres, où l’on trouve le moins d’infrastructures, le moins de protections. La foudre est la 25ᵉ cause de décès dans le monde.

SUNiBrain :
SUNiBrain est une start-up de 7 employés novatrice en matière de refroidissement des panneaux photovoltaïques. La chaleur diminuant le rendement des panneaux, le système développé par SUNiBrain collecte l’eau de pluie pour la déverser sur les panneaux lorsque nécessaire. Une station météo embarquée ainsi que des capteurs permettent de déterminer quand déclencher l’arrosage des panneaux. SUNiBrain travaille actuellement sur le développement d’une IA qui, grâce à des prévisions météorologiques, permettrait de mieux réguler la gestion du stock d’eau de pluie.

Questions-Réponses :

David POLLACK : À quelle échéance votre entreprise raisonne-t-elle ?

Damien DUMEZ : Notre entreprise évolue avec l’amélioration des technologies. Nous raisonnons donc à des échelles de 5 à 10 ans.

Laurent DUBUS : Dans le cadre des énergies renouvelables, toutes les échelles de temps nous intéressent, que ce soit à très court terme pour la consommation immédiate (les gens vont-ils consommer beaucoup dans les heures à venir ? Les éoliennes seront-elles assez productives ?) comme à long terme pour le dimensionnement du réseau et les possibilités de production futures.

Élève : Quel est votre cursus ?

Margaux ROUBAUD : J’ai fait une licence d’océanographie à Marseille dont un an d’ERASMUS en Angleterre. J’ai fait une première année de master en hydrologie en Chine puis je suis revenue en France pour intégrer Polytech’ Nice, puis un master en administration à l’IAE.

Laurent DUBUS : J’ai fait une licence en mécanique des fluides puis j’ai intégré l’ENSTA en Génie Maritime. J’ai ensuite effectué un master en océanographie à Paris VI. J’ai eu mon premier emploi à l’IFREMER puis j’ai ensuite été embauché à EDF.

Stéphane SCHMITT : Je ne suis pas un pur scientifique, j’ai fait de l’économie à l’IAE de Bordeaux. Je suis surtout sensible à la vulgarisation et à la sensibilisation.

Damien DUMEZ : Après le BAC, j’ai fait une prépa puis j’ai intégré une école d’informatique. J’ai commencé en tant que développeur pour le célèbre site de rencontre Meetic.

Simon MITTELBERGER : Jusqu’à quelle échéance avez-vous confiance dans les prévisions de Météo-France ?

Laurent DUBUS : Nous accordons une meilleure confiance aux prévisions de Météo-France que vous ne le faites ! En effet, vous jugez la qualité de celles-ci via des scores mais tout dépend du besoin du client. Même si les scores ne sont pas parfaits à longue échéance, les prévisions nous apportent tout de même de l’information.

Margaux ROUBAUD : Lorsque nous utilisons les modèles déterministes, nous considérons les prévisions avec précaution à partir de 7 jours. À partir de 14 jours, sauf si des tendances très fortes sont prévues par les modèles probabilistes, nous les faisons tendre vers la climatologie.

Élève : Utilisez-vous des modèles de prévision similaires à ceux de Météo-France ?

Margaux ROUBAUD : Non, mais nos modèles hydrologiques prennent en entrée les sorties de l’un des modèles de Météo-France.

Stéphane SCHMITT : Nous utilisons un réseau d’observation et non des prévisions, car nous travaillons à court terme (quelques heures).

Damien DUMEZ : Nous n’utilisons pas encore de modèles de prévisions.

Élève : une question pour Météorage. Le réseau dont vous parlez est-il le vôtre ? Utilisez-vous des réseaux collaboratifs ?

Stéphane SCHMITT : Nous avons notre propre réseau de mesures à haut niveau technologique permettant de détecter les impacts de foudre grâce aux signaux radio-électriques. Quelques stations appartiennent à des amateurs mais nous n’utilisons pas de données de réseaux collaboratifs.

Élève : Avec le changement climatique, la qualité des prévisions risque de se dégrader. Est-ce que la perte de confiance dans les prévisions risque d’entraîner une diminution de l’investissement dans les énergies renouvelables ?

Laurent DUBUS : L’investissement dans les énergies renouvelables ne dépend pas de la confiance accordée aux prévisions mais plutôt de l’estimation des ressources futures et des aides financières de l’État.

Élève : Que faites vous des éoliennes et panneaux photovoltaïques hors d’usage ?

Laurent DUBUS : Les énergies vertes sont-elles si vertes que ça ? Lorsque l’on engage des travaux pour une exploitation, photovoltaïque ou éolienne, nous nous engageons à assurer le démantèlement et le recyclage mais pour l’instant il reste beaucoup d’incertitude quant aux procédés.

Damien DUMEZ : Pour les panneaux photovoltaïques, une start-up à Montpellier arrive à recycler jusqu’à 97 % des panneaux. Beaucoup de choses commencent à se mettre en place dans ce domaine. Par ailleurs, il faut noter que la durée de vie des panneaux a beaucoup augmenté. En effet, on obtient à présent des panneaux ayant une efficacité d’encore 80 % de leur efficacité initiale 20 ans après leur installation.

Simon MITTELBERGER : Faites-vous de la communication ou de la vulgarisation à propos du changement climatique à vos clients ou au grand public ?

Laurent DUBUS : Pour le grand public, nous sensibilisons grâce à des campagnes de publicité mais nous sommes aussi engagés plus particulièrement auprès des écoles. En effet, nous prenons part à des mécénats comme CGénial et La Main à la Pâte qui ont pour but de sensibiliser les enfants aux enjeux de société liés à l’avancée des sciences et des technologies. Nous organisons aussi des salons afin de communiquer à ce sujet auprès des professionnels et des collectivités territoriales.

Stéphane SCHMITT : Je trouve pour ma part que Météo-France se cantonne trop à son rôle initial et ne communique pas assez à propos du réchauffement climatique auprès du grand public.

David POLLACK : En effet, pour y remédier Météo-France commence à mettre en place des partenariats avec l’Éducation Nationale.

Élève : Une question pour SUNiBrain, quel est votre type de clientèle ?

Damien DUMEZ : Le système n’étant rentable qu’à partir de 700 m² de surface de panneaux et 100 kW, nous travaillons surtout avec de grandes exploitations agricoles ou de grandes sociétés.